[Irlande] Symphonie du Nouveau Monde [Lia]

Série de post 5


Naeleny resta à genoux, essayant de reprendre sa respiration. Le trajet en lui-même par les Portes entre la Galatie et cette partie de Gaia appelée Irlande n’avait rien de spécial. L’arrivée, en revanche… A l’instant où elle avait mis les pieds sur Gaia, la jeune femme avait été prise d’un mal de tête puissant, ainsi que d’un vertige. Sous son crâne, des voix résonnaient en échos infinis, chuchotant des choses qu’elle n’entendait pas vraiment, à la limite de sa compréhension. C’était comme chercher un mot que vous aviez sur le bout de la langue… L’effort était trop grand pour supporter cette pression, et Naeleny s’évanouit pour de bon.

Elle reprit conscience en un instant, sans transition entre le sommeil et la lucidité. Elle était allongée toute habillée sur un lit une place, dans une chambre aux meubles simples et sobres mais à la décoration pourtant chaleureuse.
– « Where am i? Where is this place? …. Wait, what is this language? What the f**k!!! »
Naeleny paniqua ! Voilà qu’elle parlait une autre langue, dont elle n’avait aucun souvenir d’apprentissage.
*« C’est normal, c’est de la magie…»* fit Jove. Le serpent était roulé sur lui-même, précairement penché sur la pile de bagages que la jeune bibliothécaire avait emmenés avec elle depuis Othkar. Essentiellement des livres, bien sûr… *« Tu parles la langue locale… Hikaru t’en avait parlé, pourtant…»*

Le reproche dans la « voix » de son compagnon laissa Naeleny de marbre… Elle n’avait pas vraiment fait attention à ce détail particulier. Il faut dire qu’elle avait eu d’autres chats à fouetter. Comme à son habitude, Hikaru, Chef incontesté des Malefactor, lui avait donné une mission avec tout juste deux heures pour se préparer. Et quelle mission !!! Se rendre sur Gaia et se faire passer pour un adulte enseignant au sein de l’établissement NDSE, le QG des Magister et Minister Magi, leurs ennemis. Elle allait être ses yeux et ses oreilles pendant qu’il restait sur Othkar. C’était pourquoi elle avait pris tant de livres : les rares ouvrages de la vie de Gaia, écrits il y a déjà plus de 500 ans par les rares survivants, et des livres de magie, pour continuer son apprentissage seule.

Naeleny se palpa la tête puis le corps. Rien de cassé et apparemment, rien de manquant dans ses valises. Et le fait que Jove soit tranquillement en train de faire sa sixième sieste de la journée… Non, aucun danger ici…
– « Hum hello? » appela-t-elle en anglais. Les mots lui étaient venus directement, mais la jeune femme était quelqu’un de curieux : elle essaya de penser en anglais et d’identifier le processus qui la faisait parler si rapidement et fluidement dans cet étrange langage. Impossible ! Il semblerait que chercher à maitriser ce concept de façon consciente annulait le processus magique. « Ne me dites pas que j’ai oublié l’Othkarien!!!» s’emporta avec un peu de panique Naeleny… mais non, elle parlait bien les deux langues. Elle n’avait pas pensé à parler dans telle ou telle langue pour que cela fonctionne. Décidément, la magie était quelque chose de formidable

La jeune femme se mit debout et arrangea sa tenue, avant de récupérer Jove. Malgré tout, hors de question de laisser son compagnon seul dans un endroit inconnu.
– « So… what’s now ? »

La porte donnait sur une cave, ou un endroit y ressemblant, où étaient entreposés bouteilles, victuailles et cartons.
L'arrière boutique du pub appartenant aux Malagaï, de toute évidence.
Ainsi, aussi improbable que cela puisse paraître, Hikaru possédait bel et bien une porte entre les deux mondes.

Lia se tourna vers Naeleny, attendant avec appréhension le moment où la jeune femme réaliserait qu'elle était dans un autre monde, n'existant que dans des légendes il y a quelques mois.
Aussi fût-elle surprise de la retrouver à genoux, haletante, les mains sur les tempes comme si elle avait un violent mal de crâne.
La jeune Malefactor fit un pas en avant pour l'aider, mais déjà la jeune femme tombait dans les pommes.

Laissant Lia au milieu de Dublin, avec des valises et, maintenant, une Othkarienne sur les bras.
Super.

Transportant valise et Naeleny tant bien que mal près de la route (merci le ki), elle tendit le pouce, geste internationalement utile, surtout quand on est une femme.
Rapidement, une voiture s'arrêta, le conducteur, sceptique, toisant les deux jeunes femmes, dont l'une dormait sur le dos de l'autre.

-Are you OK?

Observant le jeune conducteur et remarquant l'heure matinale, Lia tenta un mensonge assez plausible.

-Hem... We had a party... and... I can't remember where I parked my car last night.

Elle eut un geste d'épaule, montrant bien la situation.

-And her? Fit-il en désignant Naeleny.
-Was the first time she drunk alcohol

L'homme eut un sourire franc.

-I'm Charlie. Jump in.

Pendant le trajet, Lia n'espérait qu'une chose. Que Naeleny n'émerge pas dans la voiture.
Passer du cheval classique à ça était certainement une expérience particulière.

Une fois devant la porte, Charlie chaleureusement remercié, rassurée en sentant la clé tourner (IL n'avait pas fait changer les serrures), Lia sourit en s'apercevant que son beau-père n'était pas là.
Elle n'avait pas la tête aux explications maintenant et, s'il était clair qu'ils en auraient une, elle n'était pas mécontente de la retarder.

Une fois Naeleny "déposée" dans la chambre d'ami avec les bagages, son serpent se juchant dessus, Lia n'eut pas à attendre longtemps.
Rapidement, l'Othkarienne ouvrit les yeux.
Et eut l'accès de panique redouté par Lia, a l'exception qu'il arrivait maintenant et pas juste après le passage de la porte.

« Where am i? Where is this place? …. Wait, what is this language? What the f**k!!! »

Le tout dans un anglais parfait. Avec l'accent Irlandais.
Comme l'avait dit Hikaru. "La langue la plus parlée".

Encore heureux que ce soit la langue la plus parlée dans le coin, parce qu'une Naeleny option bilingue mandarin ne l'intéressait pas vraiment.

« Hum hello? » sembla-t-elle tester, vérifiant qu'elle parlait bel et bien une autre langue. Puis elle sembla s'habituer, du moins admettre le fait, et tourna son attention vers Lia.

– « So… what’s now ? »

Lia reprit en anglais, contente de reparler ainsi depuis longtemps (on va faire comme si, hein, vais pas m'amuser a RP en anglais non plus xD)

-D'abord, tu es chez moi, à Dublin, en Irlande. Je te montrerai une carte tout à l'heure, je sais pas où j'ai pu fourrer mon Atlas.

Par où fallait-il commencer l'enseignement de quelqu'un découvrant notre monde?
Peut-être en l'assimilant à un humain normal, d'abord.

-Il faut s'occuper du plus important avant tout le reste. Tu es Naeleny, mais ce n'est pas un prénom qui existe, ici. Et la mission que t'as confiée Hikaru requière que tu passes inaperçue. Il faut donc le changer. Si l'on reste près des mots, aux yeux du monde, tu peux être Nelly. Nelly Suiven si l'on traduit ton nom de l'Othkarien à l'elfique, continua Lia. Oui. Cela sonne "terrestre". Qu'en penses-tu?

– « Nelly… Suiven… Je suppose que cela peut aller. Irlande, tu m’as dit…»
Naeleny reprenait ses esprits pour de bon, en même temps qu’elle perdait pieds. Déjà, la fille en face d’elle. Hikaru n’avait jamais précisé qu’elle se retrouverait en tête à tête avec son second. Ou seconde… Qui était tout aussi jeune que lui, donc plus jeune que Naeleny. La bibliothécaire n’avait pas d’a-priori, mais toute de même, se faire diriger par des gamins… Hikaru était un cas à part, il avait un je-ne-sais-quoi en lui de maléfique. Mais, qu’on ne vienne pas lui dire que les gamins de Gaia étaient aussi exceptionnels que lui…

Revenons-en à ses moutons…
– « Irlande, c’est le pays non? Mais je croyais que j’allais en… France… Je croyais avoir compris que… enfin…»
Raaah, elle détestait quand elle prenait cette voix miséreuse et peu sûre d’elle… Grrr ! Mais sa contrariété fut vite effacée quand elle regarda par la fenêtre…

Le paysage urbain la scotcha sur place, la laissant sans voix. Les couleurs, les matériaux et les … choses… Les voitures, parmi d’autres. Les réverbères, aussi… Maintenant qu’elle y faisait plus attention, l’appartement dans lequel elle se trouvait était aussi très très très bizarre, tant dans la forme que les structures… Quant aux objets…
– « Je n’y crois pas !» murmura-t-elle en Othkarien. « C’est de la folie furieuse… mais… comment ça marche ?»

Naeleny réalisa soudain qu’elle examinait depuis un long moment le fonctionnement des feux de circulation, et leurs interactions avec les voitures. Moment passé en silence, ignorant ainsi son interlocutrice.
– « Euh, désolée ? Je veux dire… C’est tellement… Vous avez ressenti ça aussi, quand vous êtes arrivés à Myndel pour la première fois… Euh… bon, qu’est-ce que je suis sensée faire maintenant ?»
Accès de panique ! Plus elle parlait, plus elle réalisait qu’elle s’était vraiment lancée dans une aventure en terrain inconnu…

Naeleny _non, Nelly, il fallait s'y faire maintenant pour ne pas gaffer plus tard_ semblait encore déboussolée. Par le passage, par la langue...
Par le monde, conclut Lia, la voyant absorbée par le paysage extérieur.

Par où était-elle sensée commencer? En passant par la porte Irlandaise, elles s'assuraient un endroit tranquille où apprendre, pour que personne ne suspecte l'origine Othkarienne de Naele... Nelly. Mais ainsi, la jeune femme était obligée d'apprendre le français en plus de la culture terrienne.
Un plus pour un moins. Le meilleur qu'on puisse espérer, sûrement.
Peut-être un jour, Hikaru lui offrirait de vraies vacances.

Naaan.

-Euh, désolée ? Je veux dire… C’est tellement… Vous avez ressenti ça aussi, quand vous êtes arrivés à Myndel pour la première fois… Euh… bon, qu’est-ce que je suis sensée faire maintenant ?»
-Tu n'as vraiment pas à t'excuser. J'ai contemplé Othkar avec les mêmes yeux.

En fait, Othkar et la magie, des années auparavant. Mais bon, on va pas chipoter.

En vérité, Lia ne savais pas exactement par où commencer. L'énormité de la tâche rendait l'élaboration d'un planning difficile...
A quoi pensait Hikaru en lui lachant une bombe pareille!
Mais pas question de le montrer a N... Nelly. Officiellement, et bien que cela ne représente actuellement pas grand chose a part avoir passé deux semaines a écouter des demandes de la part de tout Tenshi'Kuro, elle était le second d'Hikaru. Son bras droit.
Elle était _sûrement_ censée savoir ce qu'elle faisait.

-Tout d'abord, oui, l'Irlande est un pays. Un pays différent de la France, où la langue n'est pas la même. Tu as appris, en passant par la porte, l'anglais, la langue la plus utile sur Terre, enfin, Gaia corrigea-t-elle, puisque c'était la dénomination Othkarienne.

Elle inspira, continuant sur sa lancée.

-C'est à la fois un avantage et un inconvénient. Un avantage parce que ta couverture de professeur d'anglais est parfaite, un inconvénient parce qu'il va falloir apprendre le français. Et l'essentiel pour se comporter en "terrien". Tout ça en deux mois, ici, avant que nous ne rejoignions NDSE, en France. Beau programme, non? finit-elle, ironique.

Elle jeta un oeil à Nelly. Où plutôt, aux vêtements de Nelly. Le conducteur n'avait rien dit, mais ils étaient plutôt inhabituels...

-Bon, puisqu'il faut bien commencer par quelque chose... On va s'occuper du basique avant d'aller au compliqué. Et le basique, c'est se fondre dans la masse. Le paraître. Le plus important dans la société actuelle. Et pour ça, il faut changer tes vêtements. Ils sont trop différents des notres.

Elle avait beau être officiellement le second d'Hikaru, elle n'était PAS Hikaru.
Elle n'avait pas son ton autoritaire de celui qui a tout prévu à l'avance, et qui n'attend pas de discussion dans ses ordres.

-Ready?

– « Euuuuh….. …. Ok ? »
Nelly… regarda sa tenue, avec ses bottes en cuir et sa tenue en peau tannée… Elle se trouvait bien, mais elle devait admettre qu’elle ne ressemblait pas à ce qu’elle avait vu par la fenêtre. Pour autant, la jeune femme de ne sentait à l’aise à la simple idée de se retrouver habiller comme ça.
– « Je… il faudrait quand même trouver quelque chose qui… me… m’aille… Parce que si je suis mal à l’aise… ça ne va pas aider ma mission… et euh… qui aille avec ma ... mon poste de maître... »

La bibliothécaire ne semblait pas enchanter par cette nécessité.
– « Que vais-je devoir changer dans mon apparence ? ou dans mon comportement ?»
Pourtant, l’excitation montait en elle. Après tout, ce n’était pas donné à tous de pouvoir visiter, et même vivre, dans un pays étranger. Dire qu’elle ne connaissait pas encore tous les coins et recoins d’Othkar, et la voilà maintenant sur Gaia, le pays de légende ! Non, pas pays ! Monde !

Un nouveau défi pour ses capacités. Naeleny respira un grand coup, prête à faire tout ce qui était possible pour s’adapter et mériter la confiance qu’Hikaru lui avait montré. Soudain, un frisson glacé la parcourut :
– « Et pour Jove ? Il va pouvoir rester avec moi ?»
Hors de question de se séparer de son serpent. Elle avait elle-même couvé l’œuf, dans une poche entre ses seins. Le reptile n’avait aucune aptitude particulière, si ce n’était la possibilité de lui parler. Chose dont Naeleny lui était plus que reconnaissance. Il était son fils, son ami, sa moitié. Si jamais elle devait l’abandonner… alors elle rentrait sur Othkar illico-presto.

Lia observa le serpent. Même s'il n'était pas grand, et que la passion pour les reptiles existait, il serait difficile de se promener au grand jour, le serpent lové autour du cou.

-Sur Gaia, il n'y a qu'un nombre relatif de personnes n'ayant pas peur des serpents, et peu d'entre elles en adoptent un. Il sera difficile de t'exhiber avec Jove autour du cou, au risque de passer pour une excentrique, pour ne pas dire folle, et sérieusement compromettre ton intégration. En revanche, rien n'interdit de l'emmener dans ta chambre. Il faudra accepter le fait de ne le voir qu'hors des horaires de cours, ou trouver un sort de dissimulation efficace et de le garder caché sans cesse sous des vêtements, puisqu'aucun sort n'est infaillible. A toi de voir.

Lia ne cachait pas sa préférence pour une séparation pendant les cours, mais elle était mal placée pour donner des leçons, Shiro s'infiltrant dans le moindre cours et elle-même se voyant mal le laisser en Irlande pendant l'année scolaire.
Le dit Shiro observait Jove avec intérêt, intrigué par cet étrange animal sans pattes.

Lia réfléchissait aux soucis des affaires. Nelly faisait approximativement la taille de sa mère, peut-être un peu plus petite. En attendant que la jeune femme trouve un "look" terrien bien à elle, elle pouvait toujours lui prêter les anciennes affaires de Neoka, si personne ne les avait jetées.

-Pour l'apparence, il faudra changer tout ce qui est fait main, avec de la peau ou du métal. Rien de tout ça n'est courant. Tu n'as pas vraiment de signe distinctif étrange, et avec une garde-robe "Gaia", les humains n'y verront que du feu. Ils ne voient généralement que ce qu'ils veulent voir. Pour le comportement, et bien... il faudra éviter toute utilisation de l'Othkarien, bien sûr, mais aussi éviter des expressions de là-bas. Un "nom d'un troll" ou autre fera forcément tiquer.

Comment montrer le comportement humain normal quand on est soi-même quelqu'un de différent de ces mêmes humains?

-La plus simple manière d'apprendre et de s'approprier un comportement humain, c'est de le voir à l'oeuvre. Je te montre la maison, on trouve des affaires qui te conviennent, et je t'emmène visiter l'extérieur, qu'en penses-tu?

C'était peut-être un peu trop rapide, mais Nelly devait bien se faire une première idée de Gaia. Rien ne valait ce qu'on voyait de ses propres yeux, pas même le meilleur des livres, quoiqu'en dise la bibliothécaire.

Pour un peuple qui se disait civilisé et à la pointe de la technologie, Naeleny trouvait que les Terrains se résumaient à une bande de sauvages agressifs et bruyants. Tout sur cette planète semblait jaillir et vous provoquer. Les sons, les couleurs, les images, les odeurs même… Comment Lia pouvait-elle indifférente à toutes ses sollicitations ?

Qu’importe ! Nelly avait tout ce dont elle avait besoin : habits, accessoires, bagages et tout ce dont elle n’aurait jamais pensé avoir besoin. Du maquillage. Des talons. Comment ça, ses bottes en cuir ne suffisaient pas ? Satanée planète !

Malgré toute sa gentillesse, Nelly sentait bien que Lia était à bout. Elle-même devait admettre que si la situation se retrouvait inversée, la jeune femme n’aurait pas eu sa patience. Il y avait tant à voir, à comprendre, à ne pas faire, à ne pas oublier. En plus, il y avait la langue. Directement, la commandante en second s’était attaquée au problème du français. Saleté de langue. Déjà que Nelly ne savait comment elle parlait et comprenait l’anglais…

Lia l’avait lâchée dans la salle de bains pendant qu’elle s’occupait de préparer le repas… Rien que ça avait été une aventure. Les robinets qui délivraient de l’eau chaude… sans magie… Les textures des serviettes. Le rideau de douche… Les gels parfumés, les sels de bains… Nelly se faisait couler un bain mais déjà les bulles montaient, montaient, montaient, MONTAIENT ! Et le sèche-cheveux ! Une invention bien pratique, ça… Nelly pensa directement qu’elle devait l’adapter en sort. Jove, qui se prélassait sur le rebord de la fenêtre, juste à côté du radiateur… envoya une pensée comme quoi, lui aussi appréciait la civilisation…

Propre comme elle ne l’avait jamais été – sans offense pour les moyens sanitaires d’Othkar – elle entra dans la pièce principale :
– « Je suis curieuse de savoir comment on prépare les aliments ici… Kitchen = cuisine, c’est ça ? »

-C'est... exactement ça, approuva Lia, cachant sa grimace devant l'état de la salle de bain.

Nelly était gentille, appliquée et pleine de bonne volonté, mais c'était vraiment, vraiment difficile.
D'abord, parce que chaque petit détail qu'elle trouvait banal émerveillait/étonnait/terrifiait la jeune femme (rayez la mention inutile). Tout. Les voitures, les vélos, les vitrines et leurs mannequins en plastique, les boutiques ambulantes de frites, le maquillage... TOUT.

Il fallait tout expliquer, du plus simple (fermer une fermeture éclair) au plus complexe (je ne sais pas COMMENT l'eau monte dans le robinet, mais ce n'est PAS de la magie, promis) et si ça avait été drôle un moment, mon dieu, deux mois... elle aurait du mal à tenir.

Heureusement, il y avait de bons côtés. Enfin, disons que certaines choses n'étaient pas difficiles. D'abord, Nelly avait trouvé la plupart de son bonheur dans les armoires de la maison pour les vêtements, et la case "shopping intensif" avait été contournée. Ensuite, elle apprenait relativement bien le français, retenant le vocabulaire assez aisément. Une excellente chose, surtout quand on prenait en compte le fait qu'elle venait d'arriver dans un autre monde. Lia n'avait pas rencontré encore ce problème, parlant Othkarien par la porte et elfique par ses leçons, mais si elle avait du apprendre aussi vite, elle aurait laissé tomber bien avant Nelly.

-Tout dépend ce que tu prépares! Ce soir, je fais simple. Poele, marmite et eau bouillante!

Oui, parce qu'un peu fatiguée, quand même. Mais pas au point de commander des pizzas... ce qui serait amusant à tester, mais un autre jour.

-Poulet au curry et riz, annonca-t-elle en désignant les boites et emballages.

Prévenante, la sauce cuisait à part. Au cas où les épices seraient une découverte aussi retentissante que les voitures.
Lia finissait de découper les blancs de poulet, les roulant dans la farine avant de les placer dans la poele, tandis que le riz frémissait dans l'eau bouillante(*)

-Alors, Nelly, bilan du premier jour sur Gaia, ça donne quoi? demanda finalement la jeune fille, vérifiant l'heure pour la cuisson, curieuse d'avoir une vue extérieure sur ce qu'elle avait du mal à considérer comme des vacances.

Shiro, lui, retrouvait avec plaisir le canapé qu'il n'avait quitté que pour le fauteuil, s'y lovant en ronronnant.

Spoiler:

Nealeny regarda attentivement les faits et gestes de Lia, pour pouvoir les refaire en cas de besoin. Pas tant la recette en elle-même, mais les gestes qui venaient naturellement à sa compagne : ouvrir le robinet d’eau, allumer les plaques… Le concept de réfrigérateur étonna un instant l’Othkarienne, qui resta encore plus ébahie devant le four micro-ondes. Un instrument qui chauffait sans chaleur !!! OH MY GOD !!!
– « Votre monde est violent. Vous avez peut-être atteint un niveau de vie plus confortable, mais… je me sens agressée tout le temps. Même votre musique… »

Nelly désigna la radio et la télévision.
– « Vous avez tout pour en savoir plus et vous restez pourtant chez vous. Et tu m’as dit que les connaissances se perdaient. Alors, votre monde est violent. En contradiction avec lui-même. C’est comme si pour ranger les livres, je les brûlais. Tout chez vous est radical et sans appel. Vous détruisez et créer si facilement que vous avez perdu le sens de la vie… Pas étonnant que si peu d’entre vous connaissent la magie…»

Nelly se mordit les lèvres. Elle n’était pas là pour juger les hommes de Gaia. Et elle ne voulait se montrer dédaigneuse ou malpolie, à critiquer son hôte.
– « Et toi, toi qui connais les deux mondes. Lequel préfères-tu ? Dans lequel te sens-tu plus… à ta place ?»
Bien sûr, elle ne savait pas que Lia était techniquement originaire d’Othkar, puiqu’elle y était née, et que ses parents y avaient vécus toute leur vie. Mais bon, elle se doutait que la jeune femme avait passé suffisamment de temps sur le monde, à Myndel ou autre, pour faire la part des choses.

Lia soupira. Ce que disait Naeleny était vrai, tellement vrai... L'analyse d'un adulte complétement étranger montrait ce que chacun se cachait.
Et encore. Elle n'avait pas vu les infos, n'avait pas vu les banlieues, le tiers-monde, et elle serait surprise par le politique, à des kilomètres de celle d'Othkar.

-Gaia est ma terre d'origine, c'est vrai, mais... mais je ne m'y sens pas à ma place. Pas depuis que je connais la magie. Nous faisons comme si nous étions normaux, alors que nous nous cachons dans une école pour apprendre à nous servir de nos dons dans le plus grand secret.

Elle aurait bien fait un parallèle avec X-men, mais Nelly n'aurait pas compris.

-En revanche, sur Othkar, je me sens bien. Personne ne me regarde de travers parce que je fais de la lumière avec mes doigts. Dès que j'ai un moment de libre, je préfère le passer là-bas, à visiter Filiden ou les terres elfiques. Je parle autant de langues de Gaia que d'Othkar!

C'est vrai ça. Anglais et Français contre Othkarien et Elfique. Match nul.

-Je suis mieux sur Othkar, comme si c'était là où je devais aller, où je devais vivre. Mais ce n'est pas le cas pour les humains. Ils transformeraient Othkar en une deuxième Terre. Tu as un avis extérieur et sans préjugés et, de ce fait, il est très juste. Il y a des choses bien, évidemment, mais on s'applique à les réduire de jour en jour.

Lia sentait que elle ne dépeignait pas vraiment la Terre comme destination touristique numéro 1, mais comment aurait-elle fait ça, après avoir visité Othkar, où elle se sentait si bien?
La sonnerie du minuteur pour le riz la détourna rapidement de ses pensées, et pendant qu'elle l'égoutait, elle repris d'un ton plus joyeux.

-Enfin, j'imagine que tout les mondes ont leurs défauts. Je me sens bien sur Othkar, mais je n'y vit pas tout le temps.

Pas encore. Parce que si un jour quelqu'un découvrait qu'elle était une malefactor, elle devrait quitter NDSE, à coup sûr.

-Et voilà! Poulet au Curry et riz, annonca-t-elle en français en déposant les plats sur la table, ajoutant couverts et verres. Et pour le programme de demain, ou je t'emmene dans le bus et les voitures pour que tu vois ce que ça fait dedans, ou j'essaie de t'expliquer la politique...

[On est pas non plus obligées de tout faire, hmm, les elipses de temps sont les bienvenues ^^]

Aujourd’hui était un grand jour pour Naeleny. Lia l’avait prise par surprise hier, en lui annonçant qu’elle allait être la chef demain, et s’occuper d’elle de A à Z. Ainsi, l’Othkarienne se retrouvait à devoir aller faire les courses, le ménage, la cuisine etc. Pour autant, la jeune fille venait avec elle, pour lui sauver la peau si besoin…

Déjà, Nelly s’habilla toute seule. Aussi honteux que cela pouvait être, elle avait eu besoin que Lia coordonne ses habits pendant quelques temps, car la bibliothécaire choisissait des tenues qui ne correspondaient en rien aux usages terriens. Ce n’était même pas une question de mauvais goût. Puis elle prépara le petit-déjeuner, ce qui n’était pas difficile : bols de céréales dans du lait et verre de jus d’orange. Et depuis le temps, elle avait maitrisé la cafetière et la bouilloire.

Puis, avec son escorte derrière elle, Nelly prit le bus jusqu’au centre commercial, sans se tromper de ligne ou paniquer à chaque mouvement brusque de foule. Elle prit son caddie, le poussa dans les rangées du supermarché et trouva presque l’intégralité des éléments à acheter sur sa liste de course. Et elle paya en espèces, sans se tromper ou avoir l’air d’une idiote à examiner chaque pièce, pour déterminer sa valeur…

Ouf !
De retour à l’appartement, elle avait dû passer l’aspirateur et utiliser les nombreux produits d’entretien pour se débarrasser de la poussière. En elle-même, elle ne comprenait toujours pas pourquoi un plumeau et un peu savonneuse, avec beaucoup d’huile de coude, ne suffisait pas. Mais si Lia disait « non », alors c’était « non ».

Par contre, elle s’était trompée avec la machine à laver. Si Lia ne l’avait pas arrêté, elle aurait non seulement obtenu des culottes roses, mais aussi une explosion de mousse, car elle avait mis deux fois de la poudre…

Et le soir venu… elle avait cuisiné. D’accord, un steak-purée n’était pas de la haute gastronomie, mais pour elle, c’était un défi…
– « Alors, c’est bon?» demanda-t-elle d’une voix anxieuse…

Nealeny déposa lentement l’éponge qu’elle tenait à la main et tenta de lire les émotions de Lia sur son visage. Elle fut un instant tentée de lui adresser un message télépathique, en utilisant le pouvoir du Sceau, mais parce qu’elle ne savait si Bill le beau-père était lui-même un Magi… Et hors de question de laisser un Magi voir qu’elles faisaient un nouveau type de magie…

Ceci dit, pas besoin d’être devin pour voir que Lia était mal à l’aise. Beau-père. Nelly avait appris la signification de ce mot en regardant les séries télévision, les sitcoms américaines à l’eau de rose. D’ailleurs, elle avait été choquée d’apprendre que les mariages pouvaient être brisés si facilement sur Gaia.
– « Bonjour Monsieur. Je vous félicite pour votre appartement, il est vraiment très beau…» Elle sourit et s’inclina un peu, avant de se reprendre. Argh, les habitudes avaient la vie tenace… « Je vais vous laisser en famille, vous devez avoir des choses à vous dire. Lia, si tu as besoin de moi, je serais dans ma chambre…»
Et elle partit en faisant avant un crochet par le salon pour récupérer Jove. Lia le lui avait dit, les serpents n’étaient pas des animaux domestiques très courants. Dommage, la peau des serpents était douce ! Si douce !

Le départ de Nelly eut deux effets.
D'abord, le soulagement de Lia. S'il y avait clash entre elle et Bill, elle ne verrait pas le massacre.
Ensuite... elle se retrouvait en tête à tête avec l'homme qu'elle ne pouvait pas supporter et qui le lui rendait bien.

-J'avais oublié que tu rentrais pour les vacances.
-Je vois ça.

Silence.

-Ton amie est... charmante. Une élève?
-Non.

Silence géné. Lia aurait bien dit "une prof" pour l'embêter encore plus, mais Nelly ne l'était pas encore, et même si le risque que Bill interfère dans leurs projets était quasi-nul, elle n'allait pas donner une info juste pour le plaisir de le gêner.

-Euh... je repars demain
-D'accord.
-Tu te... plais à... ton école?
-Oui.

On pouvait continuer encore un moment comme ça, mais puisqu'il partait demain.

-Tu sais qu'il y a un cimétière, à l'école. Vieux et ancien, sympa comme tout.

Bill fut surpris qu'elle engage la conversation, mais de toute évidence, il n'en appréciait pas le tour.

-J'y trouvé une tombe assez récente. Celle de Neoka Tsukihana. Tu connais? asséna Lia, la voix froide, les yeux bleu glace.
-Je... euh... c'était... une demande de ta mère. Si tu crois que ça m'a amusé de jouer cette mascarade et...
-Là n'est pas la question! J'avais le droit de savoir!
-Non!

Lia recula, choquée.

-Non?
-Qu'étais-je sensé faire? Cette demande bizarre de ta mère, et toi qui commençait à... faire des trucs bizarre... je n'allais pas t'envoyer dans cet endroit bizarre!

Ce qui fait beaucoup de bizarre dans la même phrase.

-Par bizarre... tu entends magique? tenta-t-elle.
-Oui.

Woauh. Révélation de l'année. Bill connaissait la magie?

-Tu... qu'est-ce que tu sais, au juste?
-Pas grand chose. Même si tu déteste cette idée, ta mère et moi, on s'aimait.

Grimace.

-Elle m'a dit assez pour que je comprenne que je ne voulais pas en savoir plus. Qu'elle avait fui un endroit peu sûr pour toi. Que ton père était parti parce qu'il voulait fuir plus loin. Et que cet endroit lui manquait. Je n'ai jamais voulu en savoir plus, et elle a fait l'effort de s'abstenir de... bizzarerie! devant moi.
-Un endroit?
-Pas ici. Pas sur terre. Une autre bizzarerie.

Woh, woh, woh. Minute. Pause. On rembobine. Pas sur Terre? Elle ne rêvait pas, là? Non seulement elle apprenait que son beau-père connaissait la magie, que son père était un lâche, mais que sa mère vienne d'Othkar? Car ça devait être Othkar, non?

-En fait, elle ne se privait pas d'en faire, avec toi! Cette langue bizarre, ces légendes, ce...
-Stop! En fait, tu as raison. Je ne veux pas savoir.

Lia avait voulu des réponses à ses questions, mais elle ne s'était pas attendu à ça.
Bordel de merde!

-Lia, écoute, je...
-Bonne nuit, Bill.

Fin de la discussion.
Elle entendit l'homme monter les marches et fermer la porte de sa chambre. Machinalement, elle attrapa une tasse, du lait et du chocolat en poudre.
Remède interplanètaire.

Au matin, Bill était reparti, annonçant qu'il reviendrait fin août. D'accord. Non, elle ne savait pas si elle serait là. Oui, merci.
Lorsque Nelly était descendue, Lia avait sourit, mais elle savait pertinemment que le sourire n'atteignait pas ses yeux.

-Bien dormi?

Spoiler:

– « Je crois… et toi ?»
Nelly ne savait pas trop comment se comporter. Elle sentait bien que l’ambiance générale restait plombée par le retour de Bill. Elle voyait bien que Lia n’avait pas bien dormi et qu’elle en avait gros sur cœur.

Et… il lui était difficile de ne pas s’en mêler. A son corps défendant, elle avait entendue toute la conversation. Les tuyaux d’aérations ne faisaient pas que laisser l’air passer. Les voix parvenaient déformées, certes, mais amplifiées. Et même si Nelly n’avait pas cherché à entendre, elle avait dû écouter.
– « Ecoute, Lia… Je ne sais pas trop comment dire… J’ai entendu une partie de la conversation que tu as eu avec ton père. Et je vois bien que la situation n’est pas facile. Si tu veux en parler, je suis là… Et n’oublie pas que j’ai grandi à Othkar, et que j’ai travaillé près de dix ans dans une bibliothèque. Alors… si je peux aider…»

-Ce n'est pas mon père! s'insurgea Lia.

La jeune fille se mordit la lèvre. Elle n'avait pas à s'en prendre à Naeleny qui n'y pouvait vraiment rien, surtout quand elle venait lui proposer de l'aide.

-Pardon. J'ai juste un peu de mal à admettre tout ça. Si une partie de ce qu'on m'a appris est basée sur un mensonge, comment je suis sensée savoir si le reste est vrai aussi?

Elle inspira profondément, mais les mêmes questions tournaient dans sa tête depuis la veille.
Mais c'était des histoires de famille. Pouvait-elle vraiment mêler Naeleny à tout ça?

-Outre le côté personnel, j'ai des questions plein la tête. Qu'est-ce qui, il y a une quinzaine d'années, à pu pousser mes parents à fuir Othkar? Et, par quel moyen? Les portes ont toutes été fermées, non?

Lia connaissait mal l'Histoire Othkarienne, n'ayant entendu que la légende des Dix-Huit Armes. Mais Naeleny devait y être familière, d'autant plus, comme elle l'avait souligné, qu'elle avait travaillé dans une bibliothèque.
Machinalement, la jeune fille se mit à jouer avec l'emblème des Filles de la Lune à son cou, où était suspendue la bague.

Elle ne la remettrait à son doigt que lorsque Hiryû reviendrait.

– « Je ne peux pas et je ne veux pas juger. Mais même s’il n’est pas ton père… Il a quand même pris soin de toi. Et ce fait est encore plus important maintenant que tu sais que lui-même savait que… tu n’étais pas une simple petite fille. Je veux, tu en connais beaucoup, des hommes, qui acceptent d’élever une enfant qui n’est de leur sang mais qui en plus ne serait jamais vraiment à eux. Parce que… différente. »

Naeleny parlait d’une voix douce. Malgré le peu de temps qu’elle avait passé en compagnie de ce Bill, une chose lui apparaissait claire. Il avait aimé la mère de Lia, et quelque part, il l’avait aimé, elle. Assez pour prendre soin d’elle et l’envoyer à NDSE, là où elle pouvait apprendre la vérité … ou pas ! Un moyen détourne – très détourné même – de la protéger. Qui sait ce qui se serait passé si Lia avait terminé sa scolarité sans découvrir son potentiel ?

Mais le cours des pensées de Naeleny fut interrompu par les questions de Lia. A son ton, la jeune femme reconnaissait une sorte de demande d’aide. Ça aussi, elle l’avait compris rapidement. Avec Lia, il n’était pas question que la jeune ado demandât directement de l’aide ou avouât une faiblesse. Peut-être était-ce dû au fait que techniquement parlant, Lia était la chef de Nelly, donc se devait de garder un certain maintien, une aura d’infiabilité ?

Nelly fronça les sourcils et se concentra, ce qui fit qu’elle se mordillait la lèvre inférieure, un tic chez elle. Ce faisant, elle remarqua la bague que Lia tripotait. Et quelque part dans son esprit, il y eut un éclair…
– « Je pense pouvoir te répondre, du moins en partir. Comme tu sais, j’ai travaillé dans les bibliothèques, dont notamment celle de Myndel. Et bien que je n’aie pas pu avoir accès à certaines archives très confidentielles, j’en sais pas mal. Et de toute façon, il ne faut pas être l’Empereur pour savoir ce que je vais te dire. Ce n’est pas un secret, mais ce n’est pas… inscrit dans les livres d’histoires… »

Elle s’interrompit pour rassembler ses pensées et présenter les faits au mieux.
– « En fait, je dis peut-être des bêtises, mais je pense que la bague que tu portes au cou est marquée du symbole des Filles de Lune. C’était un groupe assez …hermétique… composé uniquement de femmes. Non seulement de femmes, mais de femmes qui refusaient le contact avec les hommes. Certaines étaient des Magi, d’autres non. Il n’y avait pas que des combattantes, bien que beaucoup d’entre elles étaient adepte de l’arme ou du corps à corps…»

Nelly s’interrompit en voyant l’éclat dans les yeux de Lia :
– « Mais ça, tu le sais. Bien, ça va me faciliter les choses. Les archives montrent que les Filles de la Lune était un groupe politique important, même s’il ne se mêlait pas directement de politique. Disons que les Filles se refusaient à faire de la politique, mais qu’elles représentaient une force armée mais aussi spirituelle très reconnue. Aussi, si elles disaient, voulaient ou interdisaient quelque chose, leurs voix avaient autant d’importance qu’un duc. Voire plus. Et c’est là que les choses se compliquent. »

Elle s’assura que Lia la comprenait parfaitement avant de reprendre :
– « Aayon, le Grand Conseiller de l’Empereur, a de plus en plus militer contre les Filles de la Lune. Apparement, il trouvait qu’elles prenaient de plus en plus d’ascendant sur l’Empereur. J’ai lu quelque part que la mère de l’Empereur avait elle-même des liens avec les Filles. Elle ne pouvait pas en être une, puisqu’elle était mariée et tout, mais on dit qu’elle leur avait confiée la garde d’un objet de grande valeur. Quoi ? Je ne sais pas, je n’en ai jamais trouvé trace. Quoi qu’il en soit… Aayon déclara un jour qu’une partie de Filles complotait contre l’Empereur et a demandé à ce que les incriminées soient livrées à la Garde Impériale. S’en suivit une longue période de réclamations, d’insinuation, de procès et autres manœuvres politiques. Tout ça pour finir dans une grande bataille où les traitresses furent toutes tuées. Aayon rentra vainqueur, fit pendre les quelques prisonnières et ce fut finit des Filles de la Lune. Cela fait vingt ans et plus personne ne parle d’elles. Pour moi, cela semble évident que ta mère était une Fille qui a soit échappé au massacre, soit à réussir à fuir avant la bataille»

Nelly s’arrêta et but une grande rasade de thé. A travers le sceau, elle sentait des émotions trop fortes et contradictoires en Lia pour vraiment les identifier.
– « Ne m’en veux pas. Je ne vais que dire ce que les livres rapportent. Et d’ailleurs, c’est justement là où le bat blesse. Je trouve que l’affaire a été vite, trop vite, étouffée. Par Aayon même. Officiellement, il a déclaré qu’il il considérait que seule une poignée de Filles était dissidente et qu’il ne fallait pas condamner toute une partie de la population pour rien. Seulement, l’ordre des Filles n’a pas survécu… Où sont passées les Filles dites innocentes ? Et puis, les recherches que j’ai faites ont bien montré que les Filles étaient un ordre soudé, et que toute trahison aurait été soit à grande échelle, mais dans ce cas, les Filles auraient agi différemment, soit à petite, très petite échelle. Enfin, bref, tout ça pour dire que j’ai des doutes quand à la véritable raison de cette guerre. … … et sachant ce que je sais, j’aurais tendance à penser que Aayon a accusé les Filles de trahison pour cacher une autre raison de vouloir les exterminer. Peut-être était-ce vraiment une question d’influence politique. Peut-être que les Filles ont véritablement fait quelque chose de mal… je ne sais pas...»